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SOMMAIRE

 



I - LA TRACE ET LE SIGNE DANS L'OEUVRE
Claudine Roméo : La trace chez Klee
Jeanne Oussane-Piton : Traces d'écriture
Yves Bergeret : Sur les peintures de Vicente Pimentel
Giovanni Joppolo : L'outil, la trace
Christian Jaccard : La création par la destruction, entretien avec Dominique Berthet



II - DES VIES, DES RENCONTRES, DES TRACES
Aline Dallier-Popper : Aline Gagnaire (1911-1997). Une vie, une oeuvre, des traces profondes
René Ménil : Légitime défense aujourd'hui
Dominique Berthet : Tropiques et le Surréalisme. Les traces d'une rencontre : André Breton - Aimé Césaire



III - LES TRACES ET LA MISE EN MOTS
Jean Arrouye : Traces d'un temps
Scarlett Jésus : Claude Simon, La Route des Flandres : au croisement de la peinture flamande et de la modernité
Suzanne Lampla : Traces d'Oscar Wilde dans un portrait



IV - TRACES D'UN LIEU, DE CULTURES 

Regard sur des artistes de la Caraïbe
Christian Bracy : Des restes comme début d'une histoire en train de se faire
Michel Rovelas : Le troisième millénaire sera noir, entretien avec Dominique Berthet
Klodi Cancelier et Lucien Léogane : Des signes en héritage, entretien avec Frédéric Leval
Marie-José Limouza : La femme et la mémoire, entretien avec Dominique Berthet
Alain Dumbardon : Sur les traces des Nègres marrons, entretien avec Dominique Berthet
Ernest Breleur, Serge Goudin-Thébia, Dominique Berthet : L'expérience de l'univers, entretien
François et Madeleine Sergio : Empreinte d'un lieu, traces d'un passage, entretien avec Marie-Louise Mongis



V - PARCOURS DU REGARD
Richard Guez : Les traces de l'énonciation dans le discours visuel au niveau iconique
Sandra Lancman : Le visible à l'épreuve de la vérité

n° 4 Trace(s)

​​EDITORIAL

Ce quatrième numéro de Recherches en Esthétique questionne un terme d’une complexité inattendue. Son emploi fréquent lui donne l’atour du mot simple dont la définition est supposée évidente. Pourtant, qu’est-ce qui distingue par exemple la trace de l’empreinte ? Outre les deux formulations courantes qui induisent peut-être quelques pistes de réflexion : faire une empreinte et laisser une trace, la tentative de réponse comprend de nombreux écueils.



Notre propos n’est pas de traiter des ressources de l’empreinte, déjà étudiées par Georges Didi-Huberman dans le catalogue de l’exposition portant précisément le même titre[1] ; ouvrage dans lequel l’auteur traite de la façon dont les artistes ont exploré et utilisé les richesses de ce faire. Il n’est pas non plus dans notre projet de tenter de répondre à cette question complexe concernant l’empreinte et la trace, mais plutôt de questionner la seconde notion, d’emblée en tant que marque, passage, piste (dans sa double acception : être sur la piste de…, et la piste chemin), aussi en tant que questionnement du lieu, de l’origine, regard sur le passé qui « tra- vaille » le présent, effet de survivance. Ernest Bloch avait intitulé l’un de ses ouvrages dans lequel il évoquait des faits divers, des souvenirs, des anecdotes, des histoires : Traces[2], comme autant de jalons préparant l’avenir. Walter Benjamin, quant à lui, disait de l’origine qu’elle  « est un tourbillon dans le fleuve du devenir »[3]. Cette origine-tourbillon, interrogeant tout autant le passé que le présent et donc le devenir, prend un relief particulier en cette année de commémoration de l’abolition de l’esclavage.



La trace est aussi un parcours, une piste à tracer, à frayer dans un environnement donné. Tracer, c’est ouvrir une voie, une brèche. Aux Antilles, une tracée est un sentier, une voie rudimentaire qui a été défrichée dans la forêt tropicale. Cette tracée frayée dans la forêt par les Nègres marrons en fuite, était aussi le chemin vers la liberté, le sentier de la révolte. René Ménil, créateur avec Aimé Césaire de la revue Tropiques et dont nous publions dans ce numéro un inédit, a rassemblé précisément sous le titre de Tracées[4] une série d’articles circonstanciels rédigés entre 1930 et 1980.



La trace a aussi une pensée. Edouard Glissant oppose cette pensée de la trace à la pensée de système, faussement universelle, qu’il appelle volontiers la « pensée occidentale ». La pensée de la trace prend en charge l’imprévisible, présenté et considéré comme une valeur ajoutée. La trace est le nouveau, la divagation, l’errance. « Contre ces renversées des vieilles routes, la trace est la poussée tremblante du toujours nouveau. […] La trace est à la route comme la révolte à l’injonction et la jubilation au garrot » écrit Edouard Glissant[5].



Ce quatrième numéro de Recherches en Esthétique, espérons-le, contribuera peut-être lui aussi, à ouvrir une voie grâce à cette mise en dialogue des continents et des cultures.

Dominique Berthet

Directeur de la publication
 

[1] Georges Didi-Huberman, L’empreinte, Catalogue de l’exposition, Paris, éd. du Centre Georges Pompidou, 1997.
[2] Ernest Bloch, Traces, Paris, Gallimard, 1968.
[3] Walter Benjamin, L’origine du drame allemand, Paris, Flammarion, 1985, p. 43.
[4] René Ménil, Tracées, identité, négritude, esthétique aux Antilles, Paris, Robert Laffont, 1981
[5] Edouard Glissant, Introduction à une poétique du divers, Paris, Gallimard, 1996, p. 69.

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