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Sommaire

 

 

Avant-propos

Dominique BERTHET

Résolument insolite

Valérie ARRAULT

      

De l’ordinaire à l’insolite

Dominique BERTHET

     

Actualité de l’insolite

Lise BROSSARD                                           

 

La représentation insolite (ostranenie) entre esthétique et artistique

Dominique CHATEAU      

 

Salamandres électorales

Richard CONTE

    

Insolite insolence : quand l’art contemporain

devient le seul espace de résistance

Joëlle FERLY

 

L’insolite insolent

Marc JIMENEZ

     

L’insolite dans le champ de la création chorégraphique contemporaine

Jean-Marc LACHAUD

  

L’insolite éphémère : l’espace public perturbé

Martine MALEVAL

    

De l’insolite à l’autopsie d’une démarche convulsive

Thierry MAJOR

 

L’insolite et la règle, approche sociologique

Bruno PEQUIGNOT

 

L’insolite en architecture

Émile ROMNEY

 

Guillaume Guillon-Lethière, la posture insolite ou l’imposture ?

Richard Viktor SAINSILY-CAYOL

 

Le dessin, une pratique insolite

SENTIER

 

Présentation des auteurs   

Actes n° 15

L'insolite dans l'art 

Avant-propos

Dominique BERTHET

 

 

Le colloque organisé par le CEREAP (Centre d’Études et de Recherches en Esthétique et Arts Plastiques), les 4 et 5 décembre 2010, en Guadeloupe, portait sur le thème « L’insolite ». Une quinzaine d’intervenants venant d’horizons divers étaient rassemblés au cours de ces deux journées d’étude pour croiser leurs approches. Outre deux représentants de l’IUFM de Martinique auquel était alors rattaché le CEREAP[1] (Lise Brossard et Dominique Berthet), participaient aussi des chercheurs de l’université de Paris I (Dominique Chateau, Richard Conte et Marc Jimenez), de l’université de Paris III (Bruno Péquignot), de l’université de Lorraine (Martine Maleval), de l’université de Strasbourg (Jean-Marc Lachaud) et de l’université de Montpellier (Valérie Arrault). À ces universitaires s’étaient joints quatre artistes et un architecte de Guadeloupe et de Martinique. 

Les textes rassemblés dans ce volume relèvent de plusieurs domaines : l’esthétique, l’histoire de l’art, la sociologie, la sémiologie et pour ce qui est de l’art : l’architecture, les arts de la rue, l’art chorégraphique actuel, la performance, le dessin, la peinture, l’installation. Certaines interventions s’appuyaient sur un ensemble d’images que nous reproduisons ici en noir et blanc, faute de mieux.

 

En quoi l’insolite concerne-t-il l’art ? Qu’est-ce qu’une œuvre insolite ? Si ce terme, comme certains autres, avait une dimension péjorative avant le XXe siècle, depuis, il est devenu positif, voire élogieux. On peut en effet se demander quel serait l’intérêt d’un art non chargé d’une dimension insolite ?

Est insolite ce qui va à l’encontre des usages et des habitudes ; ce qui étonne par son caractère inhabituel ou contraire aux règles, aux coutumes, aux traditions. D’où une série importante de synonymes comme : inhabituel, anormal, baroque, bizarre, curieux, drôle, étonnant, étrange, inaccoutumé, singulier, spécial, surprenant, exagéré, excentrique, absurde, extravagant, fantasque, grotesque, loufoque, invraisemblable, saugrenu, etc. Cela dit, au travers de ces renvois synonymiques, force est de constater que l’insolite se distingue de ces termes, même s’il peut se retrouver dans ces catégories. L’insolite n’est pas simplement l’imprévu qui trouble et déstabilise, c’est l’intrusion dans le connu de quelque chose de différent. C’est l’intervention dans l’univers du banal, du courant, du commun d’un élément autre. L’insolite c’est la séduction de l’inhabituel, ce que l’on remarque précisément parce que cela sort de l’ordinaire. Toutefois l’insolite peut aussi naître de l’ordinaire. En effet, si l’insolite est ce qui a priori s’oppose à l’ordinaire, l’intrusion de l’ordinaire dans une œuvre peut toutefois avoir quelque chose d’insolite, comme dans le cas d’assemblages comprenant des fragments du réel.

L’insolite naît de ce qui est différent, il relève d’un écart avec ce qui est habituel, admis, avec la norme. L’insolite crée un contraste, ce qui a pour conséquence de dérouter le spectateur ou l’auditeur. L’insolite peut aussi avoir pour origine l’intrusion de ce qui vient d’ailleurs, ce qui est étranger.

Lautréamont dans Les chants de Maldoror avait fait une description tout à fait insolite de la silhouette d’un passant : « Il est beau comme la rétractilité des serres des oiseaux rapaces ; ou encore, comme l’incertitude des mouvements musculaires dans les plaies des parties molles de la région cervicale postérieure ; ou plutôt, comme ce piège à rats perpétuel, toujours retendu par l’animal pris, qui peut prendre seul des rongeurs indéfiniment, et fonctionner même caché sous la paille ; et surtout, comme la rencontre fortuite sur une table de dissection d’une machine à coudre et d’un parapluie ! »[2]. On comprend sans mal la raison pour laquelle cet auteur a séduit les surréalistes qui, de leur côté, ont beaucoup pratiqué le recours à l’insolite pour créer des situations étranges, invraisemblables, aberrantes, irrationnelles, incongrues. Ceci ayant pour conséquence de troubler les habitudes et d’ébranler les certitudes.

Percevoir de l’insolite dans une œuvre revient à faire l’expérience d’une rencontre avec une singularité. De plus, l’insolite n’est pas sans relation avec le nouveau. En règle générale, une nouveauté artistique ou esthétique produit un effet insolite. Ajoutons pour finir que l’insolite est unique. S’il y a répétition, le caractère insolite disparaît. Il en va de même pour la notion d’audace. Est insolite ce qui est inédit et ne se produit qu’une fois.

 

Le lecteur intéressé par cette thématique pourra aussi se reporter utilement à la revue Recherches en Esthétique, l’organe éditorial du CEREAP, dont le 16e numéro paru en octobre 2010, portait également sur cette notion au travers de textes inédits[3].

 

[1] Le CEREAP est depuis janvier 2011, une équipe interne du CRILLASH (Centre de Recherches Interdisciplinaires en Lettres, Langues, Arts et Sciences Humaines) de l’Université des Antilles et de la Guyane.

[2] Lautréamont, Œuvres complètes, Les Chants de Maldoror, Paris, Librairie Générale Française, Le livre de poche, 1963, p. 322.

[3] http://berthetdominique.wix.com/site-du-cereap#!n-16-linsolite/c1uxh

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