TABLE DES MATIERES
Avant-Propos : Dominique BERTHET
Préface : Simonne HENRY-VAMORE, L’invisible
I – Centre et périphéries
Giovanni JOPPOLO : Critique et histoire de l’art à l’heure de la mondialisation
Michèle BAJ STROBEL : Arts Africains contemporains : perspectives critiques
II – Critique et insularité
Ernest BRELEUR : L’artiste face à la fonction critique
Christian BRACY : Il n’y a de place ni pour l’oubli, ni pour la souffrance
Jocelyn VALTON : Vers une esthétique du Tout-Monde. Fétiches Brisés II
Yolanda WOOD : La critique d’art dans la Caraïbe
Jean ARROUYE : Kritik 1996. De la difficulté de la critique artistique en situation d’insularité excentrée
III – Poésie et littérature
Dominique BERTHET : Tropiques, le merveilleux et la critique, le merveilleux comme critique
Scarlett JESUS : De quelques romans caribéens et de la Relation « critique » qu’ils entretiennent avec la peinture
IV – L’art comme critique
Suzanne LAMPLA : Le muralisme : art social, idéologie et critique
Lise BROSSARD : Corps et critique
Sandra LANCMAN : Des arbres en exil. Le déracinement Vu par Frans Krajcberg
V – Regards critiques
Frédéric LEVAL : L’œuvre significative
Alain JOSEPHINE : Le vide et le plan. Critique de la reproductibilité
Hugues HENRI : Crise de l’art et contamination Idéologique
Notes sur les auteurs
Actes n° 3
Art et critique
AVANT-PROPOS
Dominique Berthet
Depuis Diderot, le discours critique dans le champ des arts plastiques n’a cessé de se transformer, de s’inventer mais aussi d’être remis en cause. Parce que le destin et la pratique de la critique d’art sont liés au destin et à la pratique de l’art lui-même, la critique est constamment en devenir. Aujourd’hui, qu’en est-il de la critique ? Quelle est son utilité, son dessein ? Que sommes-nous en droit d’attendre d’elle en tant qu’amateur d’art ou en tant qu’artiste ?
Le problème du rôle social est donc ici posé, d’autant que la critique, en tant que jugement, est censée être un engagement qui répond, accompagne et fait suite à celui de l’artiste[1]. Compte tenu des positions variées, voire contradictoires qui s’affirment dans les différents débats de ces dernières années, la question de la pratique et du rôle de la critique reste donc ouverte.
Un autre aspect est à envisager : l’aptitude du discours à « parler » sur, ou de, l’image. Carl Einstein, par exemple, à juste titre, s’interrogeait, non sans scepticisme, sur la possibilité de « pouvoir saisir par les mots la totalité du visible »[2], et ajoutait qu’il existe un « gouffre infranchissable entre la parole et l’image ». La critique relève donc un défi qui, loin de la rendre impossible, au contraire, la dynamise.
Les textes qui composent cet ouvrage sont, quant à eux, la trace écrite du troisième colloque organisé par le CEREAP (Centre d’Etude et de Recher-ches en Esthétique et Arts Plastiques), sur le thème « La Critique »[3]. Ce colloque s’est tenu à l’IUFM des Antilles et de la Guyane sur le site de Martinique, les 13 et 14 décembre 1998. Il faisait suite au troisième numéro de Recherches en Esthétique, consacré lui aussi à « La Critique », tout en se singularisant du point de vue du contenu des interventions. Les approches présentées dans le présent ouvrage abordent d’autres pistes qui viennent donc compléter ce qui fut publié dans cette revue sans que pour autant, évidemment, le sujet ne soit épuisé.
Ce colloque, comme les deux précédents, a rassemblé des intervenants venant d’horizons (disciplinaires et géographiques) divers. Outre les membres du CEREAP (selon le cas : esthéticien, historien d’art, ethnologue, plasticien, littéraire ou angliciste), ont aussi apporté leur concours : un sémiologue de l’Université de Provence (Jean Arrouye), un critique d’art, collaborateur de plusieurs revues françaises et italiennes (Giovanni Joppolo), une historienne d’art Cubaine (Yolanda Wood) et un écrivain Antillais (Simonne Henry-Valmore).
Certaines interventions, compte tenu du lieu où s’est tenu ce colloque proposent une réflexion plus spécifiquement liée aux particularités de la région. En effet, toutes les questions posées par la critique prennent un relief particulier dès lors que cette critique tente de s’exercer dans un contexte d’insularité, c’est-à-dire de proximité, comme par exemple en Martinique et en Guadeloupe. Le cas de l’île de la Réunion, qui a aussi été évoqué lors de ce colloque, est à ce sujet tout aussi révélateur. A cette difficulté, s’ajoute le fait que les artistes dits de la « périphérie » ne reçoivent pas l’écho qu’ils méritent dans la critique internationale. S’ils sont présents dans les expositions de leur secteur géographique, ils sont en revanche absents de la plupart des grandes biennales internationales, exception faite de celle de São Paulo qui accueille par exemple, un certain nombre d’artistes de la Caraïbe. La pratique de la critique dans ce contexte spécifique débouche-t-elle sur d’autres postures, d’autres préoccupations, d’autres enjeux ? Quant à l’engagement du critique, quels aspects prend-il ? Ce colloque, comme le montrent les textes qui suivent, a tenté d’apporter sa contribution dans la mise à jour de particularités, de difficultés et de défis en présence dans les « marges », les « périphéries » de ce qu’il est devenu commun d’appeler le « centre ».
mars 1999
[1] J’ai tenté de développer cette idée dans « Le défi de la critique et l’engagement du critique », Critique et enseignement artistique : des pratiques aux discours, Paris, L’Harmattan, 1997, pp. 139-144.
[2] Carl Einstein, Georges Braque, Paris, Chronique du jour, 1994, p. 185.
[3] Les actes du premier colloque du CEREAP ont été publiés sous le titre Distances dans les arts plastiques, Paris/Fort-de-France, éd. CNDP/CRDP Antilles-Gyuane, 1997. Les actes du second colloque ont été publiés aux éditions Ibis Rouge en 1998, sous le titre Art et Appropriation.